Droit à l'erreur de l'entreprise: qu'est-ce que ça veut dire?
Le 31 juillet dernier, l'Assemblée nationale a adopté définitivement le projet de loi « pour un Etat au service d'une société de confiance » (également connu sous le nom de « droit à l’erreur »).
Ce texte autorise les employeurs à corriger leurs erreurs administratives lorsqu'ils les ont commises de bonne foi, afin d'éviter une sanction. Il supprime également les sanctions pénales encourues par les collecteurs du prélèvement à la source.
La loi devrait être prochainement publiée au Journal Officiel (JO), sous réserve d’un éventuel recours devant le Conseil Constitutionnel.
Cette note d’information présente les mesures principales du projet de loi :
❖ Reconnaissance d’un droit à l'erreur
Le projet de loi instaure « une confiance a priori de l’administration envers les personnes physiques et morales agissant de bonne foi qui méconnaissent involontairement une règle, pour la première fois ». Ces personnes bénéficieront donc désormais d'un droit à l'erreur, c'est-à-dire une présomption de bonne foi lors de la première erreur commise dans l’application d’une règle.
Par exemple, si une entreprise commet une erreur dans la déclaration des rémunérations assujetties aux cotisations d'assurance chômage, elle pourra régulariser d'elles-mêmes de telles erreurs, ou bien être invitées à le faire par l'administration dans un délai imparti. Toutefois, si l'administration démontre la mauvaise foi de l'entreprise ou sa volonté de commettre une fraude, la sanction pourra être prononcée, sans que l'entreprise ne soit invitée à régulariser sa situation.
Attention : Certains types de sanctions administratives (la loi ne concerne pas les sanctions pénales) seront exclus de cette tolérance, notamment lorsqu'elles permettent de mettre en oeuvre le droit de l'Union européenne ou qu'elles protègent la santé et la sécurité des personnes (exemple : lorsqu’une entreprise oublie d'établir une déclaration préalable à l'embauche d'un nouveau salarié ce qui empêche ce dernier de bénéficier d’une couverture sociale).
❖ Instauration d’un droit d'être contrôlé
Selon le projet de loi, les entreprises (et non les salariés) auront la possibilité de demander à bénéficier d'un contrôle pour s’assurer de la conformité de ses pratiques avec les règles applicables.
Ce nouveau droit de contrôle se veut être « un outil instaurant un dialogue entre les autorités de contrôle et les personnes contrôlées ». L'administration procédera au contrôle sollicité « dans un délai raisonnable ».
La loi ajoute de nouvelles possibilités pour les employeurs de demander des rescrits sociaux. Ils pourront ainsi:
- Interroger l'inspecteur du travail sur la conformité à la loi de leur règlement intérieur ;
- Interroger Pôle emploi au sujet d'un mandataire social afin de déterminer son assujettissement à l'obligation
d'assurance contre le risque de privation d'emploi ;
- Interroger l'administration sur les modalités de prise en compte des effectifs servant de base au calcul du
plafond de stagiaires
❖ Un simple avertissement en cas d’erreur
Le projet de loi donne la possibilité à la Direccte de prononcer, quelque soit la taille de l’entreprise, un simple
avertissement au lieu d’une amende administrative.
Cette mesure ne s’applique que dans les cas listés à l'article L. 8115-1 du code du travail, c’est-à-dire : la
méconnaissance de certaines règles relatives à la durée du travail, aux repos, au salaire minimum, et aux
règles d'hygiène et d'hébergement.
Ainsi la Direccte pourra moduler la sanction - et choisir de recourir plutôt à l'avertissement qu'à l'amende - en
fonction des circonstances et de la gravité du manquement, mais aussi au regard de la bonne foi de son
auteur, ses ressources et ses charges.
En cas de récidive de l'entreprise dans un délai d'un an après un avertissement, l'entreprise encourra une amende
majorée de façon intermédiaire : le montant maximal de l'amende administrative (2 000 euros) sera majoré de 50 %,
c'est-à-dire 3 000 euros (pour rappel, en cas de récidive à la suite d'une amende administrative, l'entreprise encourt
une amende doublée, d'au maximum 4 000 euros).
❖ Allégement des sanctions prévues autour du prélèvement à la source
Le projet de loi supprime la sanction pénale encourue par les employeurs en cas de divulgation du taux de
prélèvement à la source de ses salariés (cette incrimination a été introduite dans le code général des impôts par
la loi de finances 2017).
Toutefois, le gouvernement indique que restent applicables les sanctions de droit commun (sanctions
financières) prévues par le code pénal pour protéger le secret professionnel et sanctionner un usage
détourné des données.
Le gouvernement a tenu à rassurer les dirigeants d'entreprise s'agissant du prélèvement à la source : il a indiqué
que la ligne de conduite de l'administration fiscale sera souple dans un premier temps et que cette dernière procédera
durant les premiers mois d'application de la réforme à « un simple rappel des obligations applicables sans appliquer
de sanction ».
❖ Lancement d’expérimentations
Le projet de loi prévoit plusieurs mesures expérimentales :
- La généralisation de la médiation entre les cotisants et les organismes de recouvrement (durée de
l’expérience : 3 ans) ;
- La limitation de la durée des contrôles administratifs de l’Urssaf et de l’inspection du travail sur
certaines entreprises des Hauts-de-France et d’Auvergne-Rhône-Alpes (durée de l’expérience :
pendant une période de 3 ans les entreprises de moins de 250 salariés ne pourront pas être contrôlées
durant plus de 9 mois cumulés et les entreprises de moins de 20 salariés ne pourront être contrôlées durant
plus de 3 mois).